mercredi 12 décembre 2007

Notes de voyages dans un monde fractal – Episode II

Avec Séoul, l’objectif était ambitieux : approfondir ce que mes derniers séjours m’avaient laissé entr’apercevoir, une frémissante émergence de quelque chose au-delà du Séoul habituel, la ville usine dans un pays usine.

En priorité sur la liste, la visite du Leeum Samsumg Museum. J’ai été enchanté et très inspiré par ce lieu.

3 bâtiments qui communiquent. Le premier dessiné par l’architecte Mario Botta, le second par Jean Nouvel et le dernier par Rem Koolhaas. Le premier musée expose des pièces anciennes de l’art coréen. La mise en scène est tellement géniale qu’ils exposeraient de la vaisselle Ikéa, cela sera sûrement aussi génial. Le parcours (du 4ème étage au rez de chaussée) est un véritable parcours initiatique à l’art coréen et à l’art Bouddhiste.

Le deuxième musée est tout aussi génial. Moi qui ne suis pas un grand fan de Jean Nouvel, j’ai beaucoup admiré le lieu qui est en parfait accord avec les oeuvres qui suivent là encore un parcours initiatique, d’abord avec les artistes contemporains Coréens puis internationaux, pour finir avec ce qui se fait de mieux dans l’avant-garde coréenne et internationale.

Le troisième musée présente une exposition temporaire sur… le vide dans l’art Coréen ! Il s’agit d’un mélange complètement fractal entre les plus vieilles antiquités coréennes et les artistes coréens d’avant-garde, mis en valeur par la mise en scène et le bâtiment de Rem Koolhas.

Le vide, la vacuité, principe essentiel du bouddhisme, inspire complètement l’art coréen depuis toujours. J’ai été pratiquement seul pendant toute la durée de la visite de ces lieux magiques… flottant dans la vacuité exprimée pas les œuvres elles-mêmes et le bâtiments de Rem Koolhaas

La journée s’est terminée par un dîner à l’hôtel W. Un véritable temple du design. La chaine W est déjà un concept intéressant qui trouve là une parfaite réalisation…. Là aussi, vision fractale du monde, vision sur Séoul, restaurant au design international, cuisine fusion : suis-je en Corée, à un point d’émergence d’une culture avant-gardiste coréenne sur la scène internationale ? Ou plus simplement dans un îlot d’avant-garde international noyée dans la ville usine ?

Comme évoqué précédemment (Notes de voyage épisode I), je pense qu’il ne faut pas négliger l’importance des flagship stores des grandes marques. Je crois qu'il s'agit à la fois des cathédrales des temps modernes, du paroxysme de la société de consommation, et parfois d’un début d’émergence de la société création – communication.

J’avais donc décidé de visiter le nouveau magasin Hermès de Séoul, ou plutôt la Maison Hemés Dosan Park.

De toute évidence, la rentabilité du magasin lui-même n'a pas été la priorité dans les décisions (j'étais seul pendant la visite de tous les étages du magasin...) le but est bien de créer un univers, une image cohérente, un musée à la gloire de la marque Le déjeuner, ou plutôt l’expérience culinaire Hermès en est un élément : les assiette Hermès, les couverts Hermès, le service et la nourriture Hermès, la mise en scène… Bien sûr, quand j'ai voulu partir en laissant l’argent sans attendre la monnaie : "I am sorry Sir, no tipping". Où avais-je la tête, on ne laisse pas de pourboire dans les musées…

Mais le grand moment de la visite, c’est le musée Promenade conçu par Hilton McConnico. Une mise en scène incroyable pour un grand moment d’émotion. Une forêt en apesanteur plantée d'arbres à l'écorce couverte par le fameux cuir vibrato d'Hermès. Et, à l'intérieur des troncs, des vitrines-écrins avec des objets, des photos et des vidéos qui déroulent l'histoire de la maison Hermès. Une expérience sensorielle futuriste à la gloire du passé. Le passé dans le présent et le présent dans le passé…


Est-ce de l’art fractal au service du commerce, ou du commerce fractal au service de l’art ?

En résumé :

- une ville usine à la pointe de l’avant-garde artistique

- un musée magasin

- un hôtel musée du design avant-garde

- un magasin musée

Je crois qu’il va falloir continuer à observer les signaux faibles de la mode et du design à Séoul… C’est plus dure que dans la plupart des autres capitales mais sûrement plus émergent aussi.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Bruno, merci pour toutes ces visions "fractales" ! Juste une petite question : faut-il voyager loin pour avoir de telles expériences ? ne trouve-t-on pas au pied de son immeuble ou devant sa porte de maison bien des choses qui devraient nous surprendre de la même façon, ici en Europe ? au fond, si l'étonnement redevenait une vertu vraiment active tous les jours, notre vieille Europe n'est-elle pas aussi un monde inconnu ? et ne recèle-t-elle pas bien des trésors perdus que bon nombre d'entre nous vont chercher dans l'Himalaya ou au Japon ?

Bruno Marion a dit…

Bonjour Anonyme (est-ce que l'on se connait ?)

Merci pour tous les commentaires. Je ne crois pas en effet nécessaire d'aller au bout du monde pour le découvrir. Moi, sans aucun doute, cela m'aide. C'est peut-être mon chemin... Je suis convaincu que pour d'autre le chemin est différent.

Et je suis bien d'accord, l'étonnement permanent est un chemin de vie à lui seul. Indispensable. Conserver sa capacité d'étonnement, c'est peut-être aussi rester jeune...

Bruno.

Anonyme a dit…

C'est vrai que chacun a son chemin.
Ce qui me frappe dans tous les articles, c'est que ces voyages en Orient n'ont peut-être pas eu pour but de vraiment connaître l'Orient, mais d'y trouver une image répétée de l'Occident que l'orient veut donner de lui même, du moins une partie de l'Orient...
Ce que je veux dire, c'est que tu as peut-être "vu" des choses en Orient, mais qu'est-ce que c'était ? Moi, à la lecture des articles, je ne voit absolument rien, (je pèse mes mots : rien) d'oriental, mais, (je me répète aussi) un simple "copier-coller" venu de l'occident.
Je ne cherche pas à critiquer, je veux juste comprendre exactement ton point de vue sur mon observation.

Baruch.

Anonyme a dit…

mon avis sur la compréhension de l'Orient, c'est que malheureusement ce n'est pas en visitant Séoul, Shangaï, ou Tokyo (musées, magasins, architecture, etc ...) que l'on peut comprendre ce qui différencie le point de vue oriental sur les choses par rapport au point de vue disons "moderne" qui domine en Europe de l'Ouest ou aux USA, pour faire court.
Ce "point de vue" oriental, où le trouve-t-on dans sa forme épurée ? probablement plus dans sa culture propre et ancienne, dans sa philosophie, dans ses aspects "religieux" (même si ce mot recouvre d'autres réalités que ce que nous appelons religion ici), dans sa métaphysique.
Quels sont les fondements métaphysiques qui sont à la base de la pensée chinoise ou indienne, par exemple ?
Voilà qui serait plus révélateur des vraies différences avec l'esprit "moderne", et, au passage, on se rendrait peut être compte que la vraie différence n'est pas en tre Orient et Occident, mais entre métaphysique, pensée traditionnelle, et "modernité".
Au fond la vriae question derrière tout ça c'est : que veut dire "modernité" ?
Se comprendre soit-même, pour commencer à comprendre les autres, et comprendre les autres pour mieux se connaître soit-même.

Amicalement.

Baruch